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Chant et grossesse : des bénéfices observés sur le développement du bébé in utero
le 31/01/2025
Bercé par un véritable bain sonore naturel au creux de sa maman, le fœtus entend également les sons extérieurs à son environnement in utero. Magali Trassaert, psychologue clinicienne à Villeneuve d'Ascq, spécialisée dans l'accompagnement périnatal et formée au chant prénatal et à l'éveil musical, décrypte les mécanismes fascinants de la perception sonore prénatale et leurs implications sur le développement du bébé. Exploration des bienfaits de la musique, du chant et des sons pendant la grossesse, tant pour le fœtus que pour les futurs parents.
Du toucher à l'ouïe : comment le fœtus perçoit-il les sons ?
Contrairement aux idées reçues, la perception des sons par le fœtus ne se limite pas à l'audition. «Le fœtus est capable de percevoir les sons assez tôt dans la gestation, car les sons ne seront perçus uniquement par l'audition, mais en premier lieu par la peau et le massage des cellules », explique Magali Trassaert. C’est d’ailleurs le cas tout au long de notre vie, c'est l'effet “chair de poule” lorsque l’on écoute certaines musiques. Cette perception des sons chez le foetus suit un développement chronologique précis : le système cutané se développe en premier, suivi des systèmes gustatif, olfactif et vestibulaire, avant le développement du système auditif.« Lors de la formation embryonnaire, les cellules réceptrices du son proviendraient[1] des mêmes souches que celles qui vont former l'oreille », précise la spécialiste.
La sensibilité cutanée débute dès la septième semaine de grossesse et atteint l'ensemble du corps du fœtus vers la vingtième semaine. Le système auditif, quant à lui, devient fonctionnel vers le sixième mois. « Les premières réactions du fœtus au bruit s'observent généralement autour des 24ᵉ et 27ᵉ semaines, et il atteint une performance optimale à 32-33 semaines, ce qui correspond à huit mois de grossesse », précise la spécialiste.
L’environnement intra-utérin est principalement composé de liquide amniotique. « Le son est amplifié dans l'eau. Il va se transmettre plus vite et de manière plus intense. 70 décibels dans l'air deviennent 110 décibels in utero », souligne la psychologue. Le fœtus est particulièrement réceptif aux basses fréquences, qui traversent plus facilement la barrière placentaire et le liquide amniotique. Les voix graves sont ainsi plus facilement perceptibles par le fœtus, de même que la voix de sa mère qui lui parvient non seulement par voie aérienne (extérieure) et par voie osseuse (interne)
Les effets de la voix chantée sur le développement fœtal
Selon Marie-Claire Busnel, dans « L'Aube des sens », la voix chantée provoque des résonances beaucoup plus intenses que la voix parlée et offre des massages sonores à l'ensemble du cerveau, ayant ainsi un impact physique et neurologique puissant. « Des études mettent en évidence que les musiques qui apportent un bien-être ont une fréquence de 432Hz, ce qui correspond à la résonance des éléments naturels comme la terre et l'eau », ajoute la psychologue.
Selon les travaux cités par Magali Trassaert, notamment ceux de Sonia Arenillas Alcon et al. dans un article pour "Developmental Science", « l'exposition prénatale à la musique serait associée à un codage précis de la fréquence de la parole humaine », ce qui pourrait participer à l'acquisition précoce du langage.
La musique stimule également le développement des circuits cérébraux liés à la communication. « La musique entendue par le fœtus incite le bébé à la vocalise. On observe parfois des mouvements de la bouche du fœtus qui essaie de chanter », raconte la psychologue. Ces premières tentatives de vocalisation constituent les prémices du développement du langage.
Le chant prénatal comme vecteur de lien parent-enfant
Le chant prénatal joue un rôle particulier dans l'établissement du lien parent-enfant. «La voix fait lien et instaure un continuum entre l'avant, pendant et après la naissance », explique Magali Trassaert. Cette continuité est particulièrement importante pour le nouveau-né qui arrive dans un environnement totalement nouveau, parfois source d'anxiété.
Didier Anzieu dans son concept de «l'enveloppe sonore du soi » et du «moi-peau », cité par la psychologue, parle d’un « bain sonore constitué par la voix et l’intonation maternelle qui serait un organisateur du moi et par conséquent de l'image de soi du bébé. » Cette dimension relationnelle s'accompagne d'effets physiologiques mesurables. « Quand on chante, on sécrète différentes hormones : des endorphines, de la dopamine et de l'ocytocine », note la spécialiste. L'ocytocine, en particulier, favorise l'attachement. C’est aussi l’hormone de la maternité, connue pour favoriser le processus d’enfantement.
En parallèle de la construction du lien mère-enfant, le coparent a, lui aussi, un rôle à jouer pour créer une relation avec l’enfant à naître. « La voix du coparent qui chante ou parle à côté du ventre de la femme enceinte, est entendu par le fœtus, ce qui permet de créer un lien in utero », souligne Magali Trassaert.
La musique prénatale s'inscrit ainsi dans une approche globale du développement et du bien-être du fœtus et de la mère, tout en renforçant les liens familiaux précoces. Comme le résume Magali Trassaert, « tout ce qui va contribuer à apaiser la mère sera bénéfique au bébé ». Ces découvertes scientifiques ouvrent de nouvelles perspectives thérapeutiques en association avec d'autres pratiques comme l'haptonomie, dont la visée est d’entrer en communication avec le bébé via le “toucher affectif”, là où le chant prénatal le propose au moyen de la voix, dans l’optique de constituer une forme de “cordon vocal” avec le bébé.
Bon à savoir
Attention à l’exposition prolongée à des sons trop intenses. «Il y a danger quand cela dépasse 135 décibels ou 80 décibels pendant 8 heures », prévient la spécialiste. Elle déconseille qu’un casque ou des haut-parleurs soient en contact direct avec le ventre, ceci pouvant avoir une incidence délétère sur le développement de l’audition du fœtus. Elle recommande également d'être attentif aux réactions du bébé : «Quand on sent que le bébé s'agite un peu trop, donne des coups de pied répétés, cela peut être un bon indicateur que le son le gêne ou que le volume sonore est trop élevé. "